François Passolunghi : LA CRÈME DU ROTIN

Comme son père juste avant lui, le Contois voue une véritable passion à la liane des forêts
tropicales. Il est l’un des rares Français à en faire meubles et objets d’art de manière artisanale.

Iest né libre. Comme l’air, comme l’art. Il a su très vite vers quoi diriger ses mains travailleuses. Mais marcher dans les pas du paternel, exactement les mêmes... Était-ce la bonne voie pour celui qui avait tant à dire, à faire, à découvrir ? Il fallait bien que jeunesse se fasse. Alors François Passolunghi a opté pour un autre chemin – néanmoins voisin – : la menuiserie et l’ébénisterie. De toute façon, à l’époque, on ne formait pas au travail du rotin... 

« À 13 ou 14 ans, je savais ce que je voulais. Mais, je ne sais pas... j’étais ado, je n’en parlais pas vraiment. Je suis donc allé travailler chez un ébéniste après mon CAP (certificat d’aptitude professionnelle). Et puis à 22 ans, j’ai démissionné. Je me suis enfin décidé à aller voir mon père et je lui ai dit que je me donnais un an pour apprendre avec lui. » Il savait que ce serait infernal. Physiquement mais aussi en termes d’horaires, de rythme, peut-être même d’argent... « Mais c’était la liberté. »

Et un si beau métier. Il sourit. Il n’y avait plus de quoi hésiter. 

DU HAUT DE GAMME

C’était la meilleure des écoles et elle se situait sous sa maison, dans un vaste atelier de Contes. Avec Joseph. C’était l’école de l’acharnement, des courbatures, des brûlures, des coupures. Celle des commandes irréalisables, des projets sans fin. Des nuits sans sommeil. Celle des ratés. Des doutes, des moments de découragement. Celle des rencontres, de la passion. Des réussites. Celle de l’émotion. Ce n’était pas une vie de salarié. C’était autre chose. Quelque chose d’intense, de vraiment maîtrisé. De rare. Aujourd’hui encore, aucune école ne dispense le savoirfaire de François Passolunghi. Et pourtant, le rotin est revenu en force dans les intérieurs depuis quelques années – 2015.

De quoi booster une activité haut de gamme qui fonctionnait déjà bien. Mais pas encore de quoi inciter les organismes de formation à proposer cette spécialité. Il le fera peut-être. Des personnes particulièrement avisées le lui ont même suggéré. Il y pense. Il adore transmettre. Il faudra juste qu’il trouve la bonne formule. Celle qui saura n’alimenter que son amour du métier, sans jamais lui ôter sa grande liberté

LA LIANE DE TARZAN

Oh non il n’a pas le monopole du rotin en France... Il secoue la tête de droite à gauche. « Non, non, non il y en a d’autres. » Enfin, il n’a pas non plus trouvé celui ou celle qui saurait rivaliser de technicité avec lui. Il hésite. Puis laisse tomber, presque un peu gêné : « C’est vrai que je suis probablement le seul à savoir tout faire en rotin. » Et ça se sait. Les commandes abondent – il vend en direct depuis 1993. Elles viennent de partout. Des grosses villas de la Côte d’Azur aux grands établissements parisiens. On parle de l’étranger ? Des sollicitations pour participer à des salons ? Des expositions ? Des designers de renom qui ne jurent que par le travail de sa main ? Sur l’immense bureau en rotin de son père s’amoncellent les dossiers. Certains ultraconfidentiels. Plans, dessins techniques, devis, facture. À deux pas, il a sa matériauthèque. De longues tiges de différents diamètres. Il s’en approche :


« Vous saviez que le rotin est de la famille des palmiers ? Que c’est une liane des Philippines ? Celle de Tarzan. » Il rit. « J’ai essayé de jouer à l’homme singe lors d’un voyage au Sri Lanka ! J’ai même fait une vidéo ! Eh bien, je peux vous dire que c’est solide ! »

Il y a aussi du bambou, dans sa collection. La plus longue

#POUR LA VIE 


Il y a de larges fauteuils, des chaises pour le salon ou pour la salle à manger, des bains de soleil et autres transats. Des tabourets, des tables basses, des paravents, etc. Dans le commerce, rien n’arrive à la cheville de ce qui se fait ici. Et si on craque ? «Il faut compter environ 1 000 euros par chaise. Mais c’est garanti à vie. » C’est-àdire que si ça casse, on ramène ? « Oui il y a ça... mais surtout, c’est solide. À l’intérieur, ça ne bougera pas. » Des doutes ? Il n’y a qu’à fureter du côté des antiquaires pour serendre compte quele salon de mamie en rotin, acheté chez un pro, a effectivement traversé les époques sans prendre une ride.


1 et 4. François Passolunghi, grâce à sa maîtrise, verse aussi dans le design contemporain avec des formes particulières.

2 et 3. Rotin naturel ou écorcé, bambou, cannage, la matériauthèque du Contois est toujours fournie.

Télécharger l'article
@aaronburden
6 janvier 2025
The body content of your post goes here. To edit this text, click on it and delete this default text and start typing your own or paste your own from a different source.
3 octobre 2024
Pierre-Antoine Bianchini et Gil Camatte, les collectionneurs. (Photo Linea webzine)